Melile, "Arpenter la voie", 1e partie

De EncyclopAtys

Arpenter la Voie, première partie : Expérience (1/2) [ deuxième partie ]

Après une courte et inconfortable nuit sous les arbres de la jungle des Cités de l'Intuition, les pas de Melile l'amènent à l'un de ses lieux de prédilection, les Sources Mystiques à l'ouest de Min-Cho. A côté du regain d'activité grouillante que connaît la ville depuis peu de temps, regain du aux récentes alertes aux tribus corrompues par la Goo dans le Bosquet de l'Ombre dont Min-Cho garde un accès, les Sources sont l'endroit idéal pour qui cherche l'apaisement de l'esprit. A chacun de ses passages Melile a l'impression que ces Sources Mystiques sont hors du temps, que rien ne les altère, comme si elles retrouvaient leur état vierge dès qu'on les quittait. En quelques gestes devenus habitude, Melile gratte la mousse qui envahit l'autel sans âge aux peintures presque estompées et dépose une offrande de nourriture au pied de ce qu'elle pense être d'antiques tombes sises le bassin naturel. Elle espère que rien ne vient perturber le repos de ceux qui demeurent ici; alors que la connaissance de ces lieux n'a pas encore été retrouvée, elle recommande tout de même ces Gisants Bienheureux comme elle les appelle auprès des Kamis et d'Atys, de Jena, de toute volonté de Bien qui les accueille en cette période troublée.

Puis elle se déleste de son armure cabossée et pénètre lentement dans le bassin, nue, pour ses ablutions du matin. Les yubos qui s'abreuvent là s'écartent en jappant, les izams s'envolent dans un frou-frou d'ailes. Elle savoure, frissonnante, le contact de l'eau qui lui pique les jambes. La fatigue des récentes batailles que la nuit n'a pas réussies à effacer lui ferait presque s'allonger là pour se reposer, mais, tout le monde le dit, ce n'est que le début d'un temps nouveau et la vigilance ne doit pas être relâchée. Elle va donc se placer sous la cascade et, à genou, se laisse inonder le crâne, les épaules, le dos, les seins, les cuisses par l'eau salvatrice. Fermant les yeux, Melile ressasse les derniers évènements. Elle est très attachée à son peuple, les Zoraïs, et soutient l'initiative des Cercles. Elle-même a décidé de s'investir humblement dans le deuxième Cercle, la spiritualité. Les choses semblent prendre forme, des idées jaillissent, on débat souvent. Enfin... jusqu'à l'appel des Kamis à Min-Cho. Melile ne connaît pas tous les tenants de l'affaire, elle sait juste que les Kamis et leurs fidèles ont remporté une grande victoire en débusquant et détruisant le mal qui affectait les tribus primaires. Mais ce n'est que le début... La rumeur dit que c'était une manigance de la Karavan et que la bataille des Primes Racines annonce la fin de la trêve séculaire...

Depuis combien de temps est-elle immergée dans ses pensées ? Elle ne sait pas répondre, mais, les yeux toujours fermés, elle reçoit la chaleur que transmettent les rayons du soleil au jour montant lorsqu'ils se réfléchissent sur la surface du bassin. Elle perçoit autour d'elle les animaux qui lapent joyeusement l'eau fraîche. Un court instant, elle ne sent plus la cascade au-dessus d'elle, mais elle discerne le corps fin et bleuté d'une homin qui semble sommeiller sous elle. Elle est là, sous la cascade, et en même temps elle n'est plus dessous mais avec la cascade, unie avec elle. Etrange ! Décontenancée, Melile ouvre les yeux, mais l'instant est passé, la sensation fugace se dissipe. Elle tressaille; un yubo pataugeant juste à côté s'ébroue et s'éloigne, un izam qui s'était posé sur sa cuisse s'envole.

Elle sort du bassin. Debout dans l'herbe, elle médite sur ce qui vient de lui arriver en attendant que le soleil, brillant effectivement dans le ciel sans nuage, vienne lécher les gouttes d'eau ruisselante. Elle est un peu confuse, elle a rêvé sans doute. Mais, comme le disent les Sages, il y a là quelque enseignement à tirer. Elle qui croit que les homins peuvent vivre en harmonie avec la planète, dans le respect de celle-ci et de ses Gardiens Kamis, et, dans une moindre mesure, sans provoquer la colère de l'obscure Karavan, s'en trouve confortée dans sa conviction. C'est, pense-t-elle, une bonne Voie pour l'hominité de s'assurer survie et prospérité en suivant des principes sains et somme-toute évidents. Pour atteindre cette harmonie, il faut arriver à comprendre Atys. Les Kamis, étant ses Gardiens et sa Voix, aident déjà l'hominité. La Karavan, secrète, intrigante, observe les homins et les Kamis – Melile espère que l'escalade de violence n'entraînera pas une aggravation du conflit entre les Puissances, pas maintenant alors que la reconstruction est en cours. La Goo ravage le Pays Malade; les Zoraïs ont pour tâche de lutter contre cette corruption de la planète. Tout cela s'agite dans la tête de Melile.

Les Chutes Mystiques ne sont pas Atys, les Zoraïs, bien que versés dans la spiritualité et l'enseignement des Kamis, ne sont pas l'hominité. Pour comprendre Atys et les Homins, pour trouver la Voie, Melile qui ne connaît que le Pays Malade doit partir à la découverte du reste de la planète, la surface et les Racines, et des civilisations qui la peuplent. Ce sera en quelque sorte un voyage initiatique qu'elle sait par avance fructueux. C'est dans la curiosité, l'observation de la différence et dans la confrontation d'idées que s'acquiert sagesse et savoir. Revêtue de son armure, elle ajuste son balluchon à sa pique et adresse un dernier regard embrassant ce lieu qu'elle chérit tant, maintenant à double titre. Elle décide de se ravitailler à Min-Cho puis de partir vers l'est, vers l'Arc caché et l'accès aux Primes Racines qu'il renferme. La première étape de son périple la conduira dans le Pays des Lacs, à FairHaven capitale du peuple Tryker dont Melile sait qu'ils sont en majorité de fervents affidés de la Karavan. La route sera longue.


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