La légende d'Yberkan - II

De EncyclopAtys

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de:Die Legende von Yberkan - II
en:The legend of Yberkan - II
es:La leyenda de Yberkan - II
fr:La légende d'Yberkan - II

Je dédie ce conte à Krill qui l'a attendu longtemps.

C'est la suite de la légende d'Yberkan que j'ai commencé de vous conter lors de la deuxième Rencontre des Bardes.

Donc, pour résumer, deux jeunes trykères se sont liées d'amitié après avoir fait connaissance dans les Vents du Songe. Nous les avions alors laissées en train de s’élancer à l’assaut d’Yberkan, seules face à ce Roi fabuleux et nous les retrouvons à la fin de ce combat épique, victorieuses.

La lumière jeta un dernier reflet chatoyant sur la robe d’Yberkan quand il finit par tomber aux pieds de Copsan. La trykère poussa un cri de joie et de défi ! Elles avaient vaincu leur adversaire. Fièrement, elle dépeça le Roi tombé, rendant un dernier hommage à sa force et sa beauté puis se tourna vers Saxy.

Allongée dans la sciure, celle-ci paraissait mal en point. Elle avait pourtant soutenu sans flancher son amie jusqu’à la victoire.
Je vais bien, je vais bien. Mais sa voix trahissait sa faiblesse.
« Saxy ? » dit Copsan en se précipitant vers son amie.
Je vais bien, je vais bien. »

Mais sa voix trahissait sa faiblesse. Alors qu’elle se relevait, Copsan put voir les larmes qui avaient coulé sur ses joues et qu’elle ne prenait même pas la peine d’essuyer.

« Tu as été formidable, Saxy ! Je n’avais aucune inquiétude te sachant derrière moi...

J’ai froid… » Copsan se précipita. Pourtant Saxy ne portait aucune marque de blessure mais Copsan fut obligée de la soutenir alors qu’elle titubait. Copsan ne savait plus quoi faire. Elle rallongea Saxy. Son amie grelottait de froid et par ses lèvres exsangues ne s’échappait qu’un souffle ténu. Désespérée, Copsan envoya un izam à leur chef de guilde.

Il sembla saisir la situation d’un seul coup d’œil, à son arrivée sur les lieux :

« Pars vite à Fairhaven et reviens avec un mektoub. Elle ne doit pas se téléporter. »

Copsan le regarda sans comprendre, quêtant une explication.

« Copsan, secoue toi ! Tu es plus réactive habituellement. »

Le temps d’activer son pacte, elle put voir son chef se pencher sur Saxy en caressant ses cheveux et murmurer : « Alors c’est toi… »

Le retour sur les mektoubs se fit à toute petite vitesse, Copsan veillant sur le mektoub tandis que le chef soutenait Saxy installée devant lui.

Pendant quatre longues semaines, Saxy resta alitée, Copsan tournant comme un fauve en cage autour de sa chambre dans la guilde, tant que son chef ne l’envoyait pas au loin sous un prétexte quelconque. Puis petit à petit, elle commença à reprendre des forces et un beau matin, elle vit débarquer dans sa chambre Copsan surexcitée criant :

« Il est là ! Viens, viens vite, allons le voir ! »

Copsan bouscula Saxy jusqu’à ce qu’elle la suive pour prendre leurs mektoubs et galoper jusqu’aux Vents du Songe. Il était là, effectivement, son plumage aussi bleu que le ciel des Lacs, Yberkan le Roi du Vent des Songes. Saxy descendit du mektoub et s’approcha doucement pour caresser la bête fabuleuse qui sembla la reconnaître. À partir de là, Saxy sembla redevenir la jeune tryker d’avant.

 

La conteuse marque une pause.

« Saxy, Copsan, nous avons un jeune arrivé de Silan, qui a demandé à rejoindre la guilde. J’aimerais que vous lui fassiez faire un tour des Lacs et que vous me donniez votre avis.
Okal Chef !
Et si vous le trouvez, montrez lui Yberkan ! »

Les deux Trykeri se regardèrent mais hochèrent la tête de concert.

Le lendemain, le chef les attendait à côté d’un jeune homin d’une beauté ravageuse. Les deux filles restèrent un moment sans voix. Même Copsan qui semblait préférer son épée à tout le reste était sous le charme.

« Maxan, je te présente Saxy et Copsan. Ce sont elles qui te guideront sur les chemins des Lacs. »

Et la tournée commença. Les sourires de Maxan enchantaient les deux homines mais Copsan n’en testait pas moins ses capacités guerrières et Saxy ne se privait pas de l’abreuver de remarques sur le forage et l’artisanat et d'analyser les réponses du novice. Dans les Vents des Songes, Yberkan semblait les attendre. Saxy s’approcha appelant Maxan auprès d' elle. Tandis qu’il approchait, elle sentit la tension de la garde mais surtout elle eut l’impression d’entendre comme une dissonance dans un chant, un chant qu’elle n’avait jamais remarqué jusque là tellement il semblait juste et « à sa place ». Elle regarda Copsan qui ne semblait rien entendre puis Maxan. Sur son beau visage, elle vit planer comme une ombre qui révélait une froideur qu’elle n’avait pas vue auparavant mais qui disparut si rapidement qu’elle se demanda si elle n’avait pas rêvé. Il caressa le roi à la demande de Saxy mais le chant devenait de plus en plus dissonant et elle dût s’écarter d’Yberkan entrainant Maxan. Le reste de la journée passa trop vite aux yeux de Copsan attirée par le magnétisme du jeune homin.

Quand, rentrées à la guilde, le chef leur demanda leur avis, pour la première fois, elles se trouvèrent en opposition totale.

« C’est un chef né, attaqua Copsan, il a le geste précis et l’endurance d’un combattant hors-pair.
Et le charisme, indiscutablement, renchérit Saxy.
Il sait ménager ses efforts et gérer à la fois son endurance et sa sève.
Il a bien assimilé les bases du forage et sait manipuler les matières, sans aucun doute.
C’est une recrue idéale, termina Copsan.
Mais pacty, Chef, ne le fais surtout pas entrer dans la guilde. »

Copsan et le chef regardèrent Saxy.

« Mais tu viens de le dire quasiment parfait. Pourquoi non ?
Ne l’as tu pas senti, Copsan ? Cette oppression, cette dissonance. On aurait dit que des bruits de bataille le suivaient partout. »

Copsan secoua la tête :

« Tu dis n’importe quoi, je n’ai rien entendu du tout. Tu es jalouse c’est tout !
Jalouse ? De quoi je suis jalouse ?
J’ai bien vu que tu faisais la tête quand il me souriait. Tu le veux pour toi ! Mais c’est à moi qu’il a prêté le plus d’attention. Voilà pourquoi tu es jalouse !
Copsan, comment peux tu dire une chose pareille ? Si tu le trouves à ton goût je te le laisse. Mais pacty, pas dans la guilde.
Alors c’est moi qui partirai ! »

Et Copsan disparut.

Saxy ferma les yeux. Le chef lui prit la main.

« « Explique moi, Saxy, qu’as-tu senti ? »

Saxy raconta le chant et l’ombre sur le visage et la tension d’Yberkan.

« Tu sais que si je le refuse dans la guilde, Copsan le suivra. Veux tu toujours que je dise non ?
Je ne veux pas perdre mon amie mais je redoute cet homin encore plus que j’ai peur de la perdre elle. »

Saxy enfouit son visage dans ses mains et secouée de sanglots finit par articuler :

« Non, il ne faut pas qu’il vienne. »

 

La conteuse marque une nouvelle pause.

La décision fit grand bruit et à la suite de Copsan plusieurs des guerriers de la guilde la quittèrent. Copsan et Maxan, forts de l’aide des anciens des Gardiens de Fairhaven, fondèrent leur propre guilde. Tout semblait leur réussir. Leur guilde ne cessait de grandir et Maxan petit à petit en prenait le contrôle. Les Gardiens n’étaient plus dans le coeur des Trykers qu’une guilde de second plan.

Jusqu’à ce qu’un jour, les Maraudeurs débarquent aux portes de Fairhaven.

Saxy s’élança aux cotés de son chef, le soutenant de toute sa sève, relevant tous les Trykers qu’elle pouvait. Au fond d’elle, elle entendait de nouveau à pleine puissance, le chant, celui de la bataille, celui qui ne l’avait plus vraiment quittée depuis la rencontre entre Maxan et Yberkan. La bataille avait atteint un point d’équilibre quand le gouverneur rejoignit les troupes qui, galvanisées, repartirent de plus belle, faisant une percée dans les rangs des Maraudeurs.

Yberkan

C’est alors que survint l’incroyable. Maxan qui combattait aux cotés du Gouverneur cria : « Marund’hak à moi ! » et asséna un grand coup d’épée sur la garde du Gouverneur.

La stupeur fut immense dans les rangs des Trykers. Les guerriers ne savaient plus qui attaquer. La pagaille était à son comble. Le chef essayait de se frayer un chemin jusqu’au Gouverneur, appelant Saxy à la rescousse. Les coups pleuvaient de tous les côtés. Sans personne pour l’aider, Saxy sentait sa sève s’épuiser. Elle continuait néanmoins à soutenir son chef qui était presque parvenu à rejoindre le Gouverneur. Plus que quelques mètres et la jonction s’opérerait. Mais Saxy n’avait plus rien. Elle avait tout donné.

Le chant enfla alors dans ses oreilles retrouvant sa tonalité pure. Une grande clameur s’éleva tandis qu’au dessus de Saxy montait Yberkan et ses couleurs chatoyantes. Dans un tonnerre, une immense onde de choc coucha tous les Marauds à terre. Les Trykers se regroupèrent autour du Gouverneur et mirent en déroute les derniers attaquants. Fairhaven était sauvée.

Le chef emporta Saxy qui s’était évanouie et la protégea de la liesse. Personne n’avait vraiment compris qu’Yberkan n’avait été en l'occasion qu’une émanation de son lien avec le Roi. Mais tous avaient vu la trahison. Et tous les membres de la guilde de Maxan furent condamnés en bloc.

Saxy n’en continuait pas moins à pleurer son amie alors que Fairhaven pansait ses plaies. Une nuit Saxy où ne parvenait pas à trouver le sommeil, elle partit pour les Vents des Songes. Sous les étoiles, le bleu d’Yberkan paraissait plus doux, apaisant sa tristesse.

« J’ai essayé de le retenir, tu sais. »

Saxy ne sursauta pas, elle savait qu’elle la trouverait là.

« Mais il avait un tel ascendant sur moi… Je l’aimais je crois.
Bien sûr. Mais ta place est ici Copsan. Pas chez les Marauds. Ici aux côtés d’Yberkan et de ceux qui t’aiment encore. »

 

La conteuse marque une dernière pause et sourit.

Laissons la nuit se refermer sur cette amitié et qu’Yberkan veille sur elles longtemps !

 


Ce conte a été dit par Kyriann, lors de la quatrième Rencontre des Bardes qui s'est tenue en Germinally 2622-2 (HRP : Février 2023).