Konshu/Background

De EncyclopAtys

Il faisait noir dans le fruit évidé où habitait la famille du forgeron, Réa se hissa laborieusement à l’intérieur ; son oreille exercée saisit la respiration de son garçon, pas assez ample et lente, il était éveillé.


« Tu peux découvrir le foyer, Konshu. »


Tirant un levier, le garçon fit remonter la hôte qui couvrait le foyer de la forge, la lumière rougeoyante et la chaleur investirent la petite maisonnée ; Réa était épuisée, en sueur ; son armure portait les traces d’un combat récent. Konshu sortit une terrine de son emplacement sous le four, et apporta le reste de ragoût de racines sur la table pour que sa mère puisse manger ; il posait les couverts en bois quand Réa l’interrompit.


« Ton père ne rentrera pas. »


C’était aussi simple que ça, le ton n’impliquait rien de temporaire ; Konshu rangea le bol et la cuiller de son père puis aida sa mère à se désarmer.


« T’es un bon petit, faut pas pleurer ; les pleurs, ça fait du bruit et ça attire les Kitins. »


Il plaça avec déférence toutes les parties de la Kostom maternelle sur les crochets fait pour les accueillir sur la paroi, Réa passa la main dans les cheveux en bataille de son fils.


« Tu sais ce qui faudra faire quand je retournerai à Atys, hein ? Faudra jeter mon corps tout en bas, parce que l’odeur attire les Kitins, et tu gardera mes armes. »


Konshu hocha la tête et alla s’asseoir à table, Réa se laissa tomber sur son tabouret et se mit à manger la bouillie brune… C’était chaud, juste ce qu’elle voulait. Konshu récita de sa petite voix rauque l’enseignement Fyros.


« Parce que ton corps, c’est tes armes ; et que comme ça, ben les ancêtres sont toujours là quand on a besoin d’eux, pour partir à la bataille avec ceux qui vivent. »


L’âge, la fatigue de cet éternel jeu de cache-cache qu’était la vie au sanctuaire, tout sembla peser sur la poitrine de Réa, épouse de Kaleb le forgeron. Elle prit une grande inspiration puis continua à manger, pour chasser l’envie de pleurer qui la prenait elle aussi.


« C’est toi notre forgeron maintenant, fils. »


Et la survie continua au sanctuaire de Noir Métal, chaque expédition pour collecter des ressources demandait son lot de vies, en retour des dons d’Atys. Des visages familiers disparaissaient, les feux dans les maisons s’éteignaient pour ne jamais être allumés à nouveau, la population fondait petit à petit, disparaissant dans les ténèbres qui étaient devenu le refuge des homins.

Puis l’émissaire de la Karavan arriva, là où jadis était venu mourir l’arc-en-ciel des ancêtres, lui et son étrange machine étaient apparus. Il parla de terres nouvelles, sur lesquelles brillait la lumière de Jena et où des cités homins s’élevaient, fières et majestueuses ; il annonça que le temps était venu, de remonter à la surface de l’écorce.

Le ciel, le soleil ; des idées extravagantes qui firent renaître l’espoir et rallumèrent le feu dans le coeur des plus jeunes Fyros de Noir Métal. L’émissaire de la Karavan parla d’un autre sanctuaire, à plusieurs jours de voyage de Noir Métal ; il y vivait des Trykers, qui comme les Fyros, faisaient partie des derniers, à habiter encore les refuges des temps sombres. C’était Eau Tranquille.

Tous les gens de Noir Métal étaient assez désespérés pour tailler leur chemin au travers des racines jusqu’à l’écorce ; le jour où la décision fut prise, Réa dit alors à son fils.


« Les mots, c’est des choses puissantes qui rentrent dans la tête des gens, ça peut les pousser à faire des choses dangereuses, comme la guerre ou bien de creuser là où il vaudrait mieux pas creuser. Méfie-toi des mots et des gens qui causent bien, c’est pas parce qu’un homin il dit être ton ami, qu’il l’est vraiment ; l’ami c’est celui qui dit rien, mais qui fait quelque chose pour toi. »


Mais Konshu était devenu un homme depuis plusieurs anneaux de bois déjà, enfilant son armure, il se contenta de répondre à sa mère.


« Alors on va faire quelque chose pour les petits homins d’Eau Tranquille, et puis pour nous aussi… On va voir le ciel. »


Et le sourire paisible et fier que Réa, femme de Kaleb le Forgeron, eût à ce moment ; fut le souvenir que Konshu garderait toujours de sa mère.