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Dernière édition: Dorothée, 16.09.2021

de:Die Geschichte eines jungen Fyros
en:Story of a Young Fyros
fr:Histoire d’un jeune Fyros






Cinquième partie

Aetis et Eree se sentaient mal à l'aise. Le Duc n'avait pas encore levé la tête de ses documents.

- Excusez-moi, nous...

- Un instant ! interrompit le Matis.

Le silence retomba dans la pièce. Les deux Fyros étaient toujours devant l'ascenseur et se jetaient des regards inquiets.

Finalement, le Matis mit les documents de côté et releva la tête. Il fixa longuement les jeunes Fyros devant lui.

- Bienvenue à vous, fit-il avec un sourire. Je suis le Duc Niero di Vanochi. Je suis vraiment désolé, mais ma fonction m'oblige à m'occuper de paperasserie assommante et bien souvent j'en oublie la politesse.

Il se leva sur ces paroles. Et d'un grand geste les invita à prendre place sur les deux chaises devant son bureau.

- Approchez, approchez. L'ambassadeur a fait vos éloges dans son dernier courrier. Vous avez fait de l'excellent travail avec ces herbes. Heureusement, car la viande de yubo est tellement fade sans elles. Il se rassit en même temps qu'eux.

- Lato m'a dit que vous voudriez rester quelque temps ici, c'est ça ?

- Oui, mais l'argent... commença Aetis.

- ...est toujours un problème ! s'exclama Di Vanochi. Ne vous inquiétez pas, j'ai quelques missions pour vous. Oh, rien de bien méchant, en général de la récolte de matières premières puisque vous y excellez.

Il fixa les deux homins qui étaient à nouveau mal à l'aise.

- Qu'y a-t-il ? Vous paraissez soucieux. Pourtant Lato m'a bien dit que vous rêviez de venir ici.

- C'est-à-dire que... commença Aetis incertain.

Le Duc se pencha en avant, soudain plus intéressé.

- Oui ?

- Eh bien, nous ne sommes pas là pour gagner quelques dappers avec des petites missions, continua Aetis.

- Comment ?! Je vous fais l'honneur d'être les premiers Fyros à travailler pour moi. Je vous fais confiance et vous me crachez au visage ? rugit Di Vanochi.

- Pas du tout, se hâta de dire Eree. Nous serions honorés d'accomplir ces missions pour vous. Mais nous avons quelque chose de beaucoup mieux que des herbes à vous offrir.

Le visage du Duc perdit le rouge qui l'avait coloré pendant quelques instants. Il avait maintenant retrouvé son calme et son sourire.

- Racontez-moi.

- Nous voulons être payés cinq cent mille dappers. Nous ne vous dirons rien avant, dit Eree.

- Vous voyez, certaines de mes affaires ne concernent pas la couronne. Je ne peux pas sortir une telle somme de mes fonds personnels pour une information dont j'ignore la nature, dit-il le regard triste.

Il se leva et se dirigea sur la droite de son bureau.

- Il me faudra beaucoup plus qu'une simple promesse pour vous donner cette somme, dit-il en croisant les bras. Racontez-m'en un peu plus, je déciderai si ça en vaut la peine.

Aetis regarda Eree. Tous deux paraissaient aussi incertains l'un que l'autre.

- J'ai pu obtenir des informations sur un important convoi zoraï qui va partir pour Pyr, avoua Eree.

- Pourquoi venir me voir ?

- J'ai entendu dire que ce genre d'informations vous intéressait. Ma rencontre avec Aetis a été l'occasion inespérée d'en tirer profit.

Le Duc semblait douter des propos d'Eree.

- Le seul problème, c'est que j'en sais déjà beaucoup sur ce convoi. De quelles informations disposez-vous ?

À nouveau, les deux Fyros se regardèrent, chacun attendant que l'autre fasse le premier pas.

L'impressionnant Duc ne leur laissait pas le choix.

- Nous connaissons la date du convoi, ainsi que le chemin qu'ils vont prendre.

- Et puis-je savoir comment deux jeunes Fyros, sans expérience, sans relations, sans dappers et sans loyauté ont pu entrer en possession d'une information que mes meilleurs agents cherchent en vain ?

Il s'était retourné. Son sourire avait disparu, il scrutait leur réaction. Eree ne perdit pas son sang-froid.

- J'ai des relations figurez-vous ! fit-elle en montant le ton de sa voix. Je suis membre de la guilde des Gueules Noires !

- Félicitation ! répondit le Duc, un faux sourire aux lèvres. Mais je ne vois toujours pas comment un insecte connaît ce secret.

Aetis commença à se lever. Il en avait plus qu'assez des manières du Duc.

- Si vous souhaitez survivre à cette journée, je vous conseille de vous rasseoir, jeune homin.

Il n'avait pas bougé, mais son regard força Aetis à se rasseoir.

- Désolé de cette interruption, continuez s'il vous plait, demanda-t-il à Eree, impatient.

- Ma guilde est étroitement liée à celle des Faces Brûlées, les gardes d'élites impériaux. Mon chef de guilde est au courant de toutes leurs missions, celle-ci n'a pas fait défaut. Il entretient aussi des bonnes relations avec l'alcool de shooki et il s'en est trop vanté auprès de la mauvaise personne...

Eree lui fit un sourire ironique. Di Vanochi, lui, ne bougeait pas. Il la regardait, cherchant le moindre signe de faiblesse.

- Je ne vous crois pas... commença-t-il.

Un frisson parcourut l'échine d'Aetis.

- ... mais étant donné que je n'ai pas d'autres sources d'informations pour le moment, je vais essayer de vous faire confiance.

Son sourire n'avait rien de rassurant.

- Je vous écoute, que savez-vous ?

- L'argent d'abord, dit Aetis qui avait retrouvé son calme.

- Vous avez compris, je pense, que je crois que vous me mentez. J'espère alors que vous comprendrez combien je suis généreux dans mon offre. Je vous propose donc deux cent mille dappers tout de suite et cinq cent mille supplémentaires si l'information se révèle juste.

- Mais c'est plus que ce que nous vous demandions ! s'étonna Eree.

- Je sais. C'est juste un petit encouragement pour vous aider à me donner la bonne information... mais si vous avez besoin de plus d'encouragements, mes gardes seront heureux de vous les fournir.

Il retourna à son bureau et prit une petite cloche. Il l'agita rapidement et tout de suite, Dino Valetti entra dans la pièce.

- Oui, mon Duc ? demanda-t-il.

- Rapportez-moi un sac de deux cent mille dappers, rapidement, ordonna le Duc.

L'intendant partit sur-le-champ. Le Duc resta là, fixant les deux homins sans lâcher un mot.

Quelques instants après, l'intendant revint tenant un sac dans la main. Il le posa sur le bureau du Duc et sortit aussi rapidement qu'il était entré.

- Voilà votre argent. Prenez-le, dit le Matis en montrant le sac.

Aetis se leva et saisit la bourse.

- Maintenant, racontez-moi tout, fit-il, souriant.

Eree exposa alors toutes les informations dont ils disposaient.

- Je pensais bien que ces sournois passeraient par le portail. Ils espèrent gagner Pyr le plus rapidement possible.

Le Matis déroula une carte d'Atys sur son bureau.

- C'est ici qu'il faut tendre l'embuscade.

Il pointait son doigt sur le défilé du Nœud de la Démence.

- Vous aimez voyager et découvrir des nouvelles cultures n'est-ce pas ?

Les deux Fyros le regardaient, incrédules.

- Magnifique ! dit-il sans attendre la réponse. Vous allez donc organiser cette attaque pour moi !

- Comment ? Nous ? Mais...

- Bien sûr, l'un de mes gardes les plus fidèles vous accompagnera... Car si vous m'avez trompé, je vous veux morts dans l'instant.

Il n'avait pas levé les yeux de la carte. Ces derniers mots avaient été dits avec une désinvolture effrayante.

- Pardon ? s'étonna Aetis.

- Assez discuté ! Vous devez partir dans l'heure. Vous avez un long voyage à faire. Natto ! cria-t-il. Natto vous accompagnera sur le territoire zoraï et veillera à votre... sécurité. Vous allez ici, dans le Bosquet de l'Ombre.

Les deux Fyros se retournèrent pour voir le guerrier matis qui venait de rentrer.

- Je vous présente Natto, le chef de ma garde.

Le Matis les salua d'un signe de tête.

- Vous allez rencontrer une sympathique tribu qui a déjà... travaillé pour moi : les Antékamis, continua le Duc. Natto sera là pour veiller au bon déroulement des transactions. Ils devront attaquer le convoi. Le butin sera divisé en deux : le pillage pour eux et le Livre pour vous. Natto, tu me le rapporteras immédiatement, accompagné, je l'espère, de nos deux amis. Vous avez peu de temps, partez maintenant.

Natto les invita à sortir de la pièce d'un mouvement du bras.

Les instants qui suivirent furent consacrés à la préparation du voyage.

- Nous utiliserons des pactes Karavan pour nous rendre au Bosquet de l'Ombre. Là nous aurons une journée de marche jusqu'au camp de la tribu, avec de la chance.

Le Matis parlait tout en marchant. Les maigres provisions qu'ils emportaient n'avaient pas pris longtemps à être achetées. Ils se dirigeaient maintenant vers l'autel Karavan.

Aetis et Eree n'avaient eu que peu de temps pour visiter la magnifique cité matis. Ils avaient profité de chaque instant, les yeux grands ouverts. Cette courte visite leur avait permis d'oublier un peu leur mission.

Le guerrier matis, qui avait semblé tellement froid au premier abord, leur expliquait des détails historiques à propos de la ville.

- Je sais que vous voudriez visiter un peu plus Yrkanis, mais nous avons trop peu de temps devant nous. Vous aurez largement de quoi profiter de la ville à notre retour. Je crois de toute façon que vous devrez rester ici. En tout cas, loin des Kamistes.

Il avait le visage plus souriant que dans le bureau de Di Vanochi.

- Nous y voici. Attendez-moi ici, je vais parler à l'Hôte Karavan.

Les deux jeunes Fyros restèrent à distance, tandis que Natto se dirigeait vers l'Hôte.

- Ça marche jusqu'à présent, dit Aetis.

- En effet, je pense qu'il nous fait confiance, acquiesça Eree

- Dommage qu'il faille le trahir...

Les deux Fyros se regardaient tristement.

- Qu'y a-t-il vous deux ? demanda Natto en revenant. N'ayez pas peur. Les terres zoraïs où nous allons sont hostiles, mais j'ai l'habitude d'aller là-bas. Il n'y aura pas de problème.

- Nous sommes prêts, lui dit Aetis, sans joie.

- Vous avez encore des doutes sur vos actes, c'est ça ? Écoutez, il faut faire des choix dans la vie. Vous avez déjà fait le vôtre. Vous ne pouvez plus reculer quoi qu'il arrive. Alors acceptez-le et vivez ce que vous avez décidé de vivre !

Aetis se sentit d'autant plus abattu par les paroles du Matis. Il tenta tout de même de sourire.

- Tu as raison. Nous allons vers un nouveau pays. J'aurais vu plus de choses en une journée que dans toute ma vie.

Le Matis éclata de rire.

- Voilà ! C'est beaucoup mieux. La téléportation est faite pour ça !

Il leur donna à chacun leur pacte.

- Avant de le briser, je veux que vous preniez en compte certaines règles. Vous marchez où je marche, vous parlez quand je vous dis de parler, vous obéissez sans discuter à mes ordres et vous ne jouez pas les héros. Je peux compter sur vous ?

Eree et Aetis acquiescèrent tous les deux.

- Très bien. Alors, allons-y !

Il écrasa le pacte dans sa main et disparu dans l'instant qui suivit.

- Il a raison, nous ne pouvons plus reculer, dit Eree.

Elle brisa son pacte et s'évanouit à son tour.

- Alors... allons-y.

Cette fois le voyage s'était mieux passé. Ignorant le léger mal de tête, Aetis ouvrit les yeux. Plusieurs bêtes étranges l'observaient. Elles étaient rondes et énormes. Leurs yeux globuleux jaunes étaient braqués sur lui. L'une des bêtes commença à s'approcher. Elle avait une longue trompe d'où sortaient des petites langues de feu. Aetis mit instinctivement la main sur la garde de son épée.

La main de Natto le retint.

- Ne t'inquiète pas, il est juste curieux. Les wombaïs sont doux comme des agneaux, si on ne les énerve pas. Il est même arrivé que certaines tribus zoraïs arrivent à les utiliser comme montures !

Le wombaï était devant lui et commença à renifler sa tunique du bout de la trompe. Natto l'écarta doucement. L'animal hésita puis se retourna pour rejoindre ses congénères.

Aetis regarda autour de lui. Ils se trouvaient devant l'autel Karavan, au beau milieu d'une plaine.

- C'est ça le pays zoraï !? s'exclama-t-il.

Eree elle aussi avait l'air déçue.

- Je croyais que c'était une jungle.

- À part l'herbe, on se croirait dans le désert, confirma Aetis.

- C'est normal, ici nous sommes dans les bordures du pays. Cela permet aux Karavan de mener les tests dont ils ont besoin sur la Goo. Ils n'ont pas la même réaction que les Kamis face à la maladie, ils pensent que son étude permettra son contrôle et donc son éradication. C'est mieux que de courir et d'appeler à l'aide les homins. Vous iriez combattre ça si un Kami vous le demandait ?

Il se tourna et pointa du doigt vers l'horizon. Aetis vit alors la maladie qui rongeait le pays. Une mer mauve s'étendait aux bordures de la plaine. Des vapeurs s'échappaient de la terre en la consumant. L'odeur était insupportable, même à cette distance.

Aetis mit instinctivement la main sur sa bouche et son nez.

- Ne t'en fais pas, même si toutes les vapeurs sont toxiques, à cette distance, nous ne risquons rien. La Goo n'infecte les homins que lorsqu'elle est concentrée ou lors d'une exposition prolongée. Nous avons une certaine résistance à sa puissance de destruction.

Aetis s'avança pour mieux voir. Natto l'empoigna rapidement.

- Tu ferais mieux de ne pas t'approcher plus, il arrive que les sources de Goo soient sous terre et surgissent lorsque l'on passe au-dessus. Il semblerait que cette chose, quoi qu'elle puisse être, soit intelligente. Nous ferions mieux de partir d'ici, plus on est loin d'elle, mieux on se porte.

Ils s'éloignèrent de l'autel et se dirigèrent vers l'ouest.

- La région est très dangereuse, il n'y a pas que des wombaïs ici. On croise des kitins de temps en temps, et il y a les bandits. Le pire, bien sur, ce sont les gibbaïs qui se promènent un peu partout.

Le Matis marchait d'un pas rapide.

- Il n'y a pas une grande distance jusqu'au camp, mais je préfère m'éloigner de la Goo, nous devrons faire quelques détours.

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Sixième partie

Comme l'avait dit Natto, ils durent souvent s'arrêter pour choisir un autre passage. Plusieurs fois, ils rebroussèrent chemin pour éviter des groupes de gibbaïs, facilement repérables avec leur fourrure bleu nuit. Ils purent même apercevoir un primitif rouge. Il était beaucoup plus grand que les autres et ses poils dressés lui donnaient un aspect enflammé.

- Celui-ci est appelé Gibbakya par les Zoraïs. Il dirige les dégénérés de la région. Je me suis déjà frotté à lui, croyez-moi, il vaut mieux partir.

Le primitif leva la tête et se mit à renifler autour de lui.

- Dépêchez-vous, je crois qu'il nous a repérés.

Ils marchèrent longtemps sans dire un mot. Ils virent enfin de loin le mauve caractéristique de la terre malade.

- Je croyais que vous vouliez vous éloigner le plus possible de la Goo, demanda Eree.

- Ce que vous voyez, même si elles ont la même couleur que la Goo, sont les tentes du campement de la tribu des Antekamis. C'est la teinte traditionnelle chez les Zoraïs. Je ne sais pas pourquoi ils l'ont gardé s'ils haïssent tellement leur peuple. Ces fous vont même jusqu'à mutiler leur masque pour défier les Kamis. Ils ne gardent que le strict minimum, sans cela, ils ne pourraient survivre.

- Comment ça ? Ce n'est qu'un masque, les Zoraïs le gardent pour être liés aux Kamis. Aetis n'avait jamais eu trop d'échange avec les Zoraïs. Il voyait ce masque comme un snobisme religieux.

- Bien sûr que non ! répondit le Matis. Le masque Zoraï est fixé à l'âme par la magie Kami. Le retirer, ce serait perdre son essence vitale. Rien qu'en arracher des morceaux, c'est déjà de la folie pure ! Les Antekamis n'ont plus aucune branche à leur masque. Ce qu'il reste sont les parties qu'ils n'ont pas pu retirer. Dépêchez-vous, nous avons pris du retard.

Ils s'approchèrent des tentes. Immenses, elles avaient été fabriquées avec des matériaux riches et onéreux. Les trois compagnons s'avancèrent prudemment, Natto en tête. Quatre Zoraïs apparurent au coin de la première tente, leur barrant le passage. Chacun était armé d'une longue pique. Aetis jeta un regard derrière lui. Quatre autres Zoraïs se tenaient derrière eux, empêchant une retraite.

- Ne vous inquiétez pas, dit le Matis, ils m'ont reconnu. Le chef ne va pas tarder à venir.

Aetis et Eree ne se sentaient pas plus rassurés pour autant. Les Zoraïs se rapprochaient, leurs piques menaçantes baissées à mi-hauteur.

- Je me nomme Natto, cria-t-il. Je souhaite parler à Pei-Jeng Luun.

- Et je suis là, mon ami.

Les quatre gardes devant eux s'écartèrent pour laisser place à un autre Zoraï. Plus petit, il se déplaçait cependant avec plus d'assurance. Derrière son masque, son regard n'avait pas le mystère des autres Zoraïs qu'Aetis avait déjà rencontrés. Il était ordinaire, presque vide.

- Bienvenue. Nous apportes-tu à nouveau quelques divertissements ? demanda-t-il.

- Oui, une nouvelle faveur pour le Duc. J'ai ramené l'habituelle compensation.

- Et eux ?

Il pointa du doigt Aetis et Eree.

- Le Duc veut être sûr de leur... loyauté.

- Je vois.

Il détourna le regard des deux Fyros qui avaient peu d'importance à ses yeux.

- Combien nous apportes-tu cette fois ? demanda le chef de tribu.

- La somme habituelle : trois cent mille dappers.

- La somme habituelle a doublé, mon ami. La dernière mission a coûté la vie à sept des membres de ma tribu.

Le Matis ne semblait pas étonné.

- Le Duc pensait bien que vous voudriez un supplément. Il a donc prévu cinq cent mille dappers de plus après la mission. Et il y a la petite prime de servir vos intérêts aussi.

Le chef de tribu scrutait le Matis.

- Nos intérêts ? Tu vas devoir t'expliquer, mon ami.

- La mission consiste à attaquer une procession zoraï pour récupérer le précieux Livre des révélations.

- Où est le piège ? Le Duc n'a jamais été généreux. Pourquoi ce soudain changement ? demanda Pei-Jeng Luun.

- Disons qu'il est très désireux de voir cette mission menée à bien, comme vous j'en suis sûr. Voyez cela comme une prime pour vos précédents services.

- C'est une grande nouvelle. Nous allons frapper nos ennemis au cœur. Une grande fête aura lieu ce soir, nous partirons demain.

- Non, dit sèchement Natto. Nous devons partir au plus tôt. Il nous faut être au défilé du Nœud de la Démence demain à la tombée de la nuit pour l'attaque.

- Il sera fait selon tes désirs.

Le chef de la tribu se tourna vers une Zoraï, près de lui.

- Pingi, ma fille, tu prends le contrôle de la tribu en mon absence. Je veux une trentaine de guerriers prêts à partir dans l'heure. En attendant, vous pouvez vous restaurer dans ma tente, dit-il à Natto.

Il les invita à le suivre. Les gardes étaient déjà partis se préparer.

La nuit venait de tomber. La tribu Zoraï avait forcé le pas toute la nuit précédente et ils étaient arrivés au défilé dans l'après-midi. Seuls les éclaireurs n'avaient pu prendre de repos. Toute la tribu était prête au combat. Ils s'étaient disposés tout autour du défilé afin de ne laisser aucune porte de sortie. Ils attendaient depuis plus d'une heure, et aucun signe de la procession. Les deux Fyros commençaient à s'inquiéter.

Ils étaient restés en haut de la falaise, Natto avec eux. Dès que l'attaque commencerait, Aetis savait qu'il devrait agir vite et tuer le Matis. Malgré la sympathie qu'il avait pour lui, il savait que Natto était trop fidèle au Duc pour les laisser partir en vie.

Aetis distingua difficilement deux éclaireurs de la tribu. Ils revenaient faire leur rapport à Luun. Cela ne dura que quelques instants. Le chef se tourna alors vers Natto et lui fit des signes rapides.

- Ils arrivent. Juste dix gardes et deux chariots, ils seront là dans quelques instants.

- Dix gardes ? Impossible ! Pourquoi ont-ils protégé un convoi d'une telle importance avec seulement dix gardes ? dit Natto, soucieux.

Il doute, pensa Aetis. Le moment est proche.

Quelques minutes s'écoulèrent dans un silence total. Aetis ne voyait plus du tout les Zoraïs en bas. Puis, la lumière des torches transforma le défilé petit à petit. La couleur orange effaçait le sombre noir sur les rochers.

Les premiers gardes zoraïs étaient visibles, portant chacun une torche. Il n'y avait effectivement que dix gardes. Ils entouraient deux chariots tirés par des mektoubs.

Les gardes étaient lourdement armés et épiaient chaque recoin du défilé. Ils arrivèrent rapidement au niveau de l'embuscade. Les Antekamis se déplaçaient silencieusement à couvert pour se mettre en position d'attaque.

Juste au moment où la tribu allait engager le combat, une lumière bleue apparut dans le premier chariot. Tous les Antekamis s'arrêtèrent, déconcertés. Le toit du fourgon explosa. Un magicien zoraï se trouvait au milieu. Les particules magiques couraient encore le long de ses amplificateurs. Autour de lui, trois autres Zoraïs se levèrent à leur tour. Le deuxième chariot explosa alors. Dans celui-ci un magicien Fyros se tenait debout. Quatre autre Fyros étaient déjà descendus du chariot en sautant pendant l'explosion. Aetis ne les avaient jamais vus auparavant, mais il savait qu'il s'agissait des Faces Brûlées, la garde d'élite. Ils se dirigeaient en courant vers les Antekamis encore abasourdis par l'effet de surprise. Le premier tomba rapidement d'un coup d'épée.

Pei-Jeng Luun reprit alors ses esprits et ordonna l'attaque. Malheureusement pour les Antekamis, les Kamistes étaient trop organisés. Les guerriers zoraïs protégeaient férocement les chariots d'où les magiciens lançaient leurs incantations. Les tireurs de la tribu furent les cibles principales des rapides guerriers fyros.

Aetis ne vit pas la suite du combat. Il avait été tellement étonné qu'il en avait oublié Natto. D'un violent revers de la main, le Matis l'envoya au sol. Eree tenta d'attaquer le guerrier dans le dos, mais il bloqua sa main et fit tomber sa dague dans le défilé. De son autre main, Eree essaya de le frapper, mais le Matis était beaucoup plus rapide. Il lui brisa le poignet gauche avec une facilité déconcertante.

Elle lâcha un cri de douleur avant d'être jetée au sol.

Natto se retourna vers Aetis qui se remettait sur pied.

- Je vous ai fait confiance, traîtres, rugit-il.

Il avait sorti son épée.

- Nous sommes restés fidèles à notre peuple, et aux homins.

Aetis fit de même avec son arme.

- Restés fidèles aux homins ? Vous vous faites manipuler et agissez comme des pantins !

Il lança une première attaque. Aetis savait qu'il ne pouvait pas lutter contre la force du Matis et s'écarta. La lame passa à quelques centimètres de lui.

- Pourquoi chercher à tout prix le conflit ? Les peuples sont en paix et le Duc cherche la guerre.

Il attaqua à son tour. Il visa le cou du Matis avec un coup rapide. Mais le guerrier avait de l'expérience. Il bloqua l'attaque et tendit la main pour prendre la garde de l'épée d'Aetis. La force brute parla et Natto envoya le Fyros au sol d'un coup d'épaule.

- Les peuples ne seront jamais en paix ! Cesse de te voiler la face !

La pointe de sa lame touchait la gorge d'Aetis. Celui-ci sentit le sang commencer à couler le long de son cou.

- Misérable serviteur de démons, tu n'aurais pas dû t'attaquer à plus fort que toi.

Un roc lui arriva alors en plein visage, écrasant son nez dans un bruit d'os brisés. Aetis tourna la tête. Eree était debout, elle tenait son bras et faisait une grimace de douleur.

Natto poussa un grognement. Il avait lâché son épée et tenait son visage en sang. Aetis n'attendit pas plus longtemps et décrocha un violent coup de pied dans le torse du Matis. Celui-ci fut projeté par la violence du coup inattendu. Il recula de quelques pas et son pied heurta le bord de la falaise. Il disparut dans un cri effroyable.

Aetis se remit debout et s'approcha du défilé. Natto était en bas. Un des guerriers zoraïs s'approcha avec une torche. Le corps du Matis était déformé tel un pantin désarticulé et le sang maculait les rochers en dessous de lui. Le Zoraï releva la tête et fit signe aux deux Fyros de descendre.

Les Kamistes n'avaient eu aucune perte. Un seul Antekami avait été pris vivant. Le reste de la tribu avait été décimé. Les magiciens soignèrent les blessures des deux Fyros et les installèrent sur l'un des chariots.

- Nous retournons vers Zora. Mabreka veut vous remercier, Vous avez fait du bon travail. Le voyage va prendre quelques temps, profitez-en pour vous reposer.

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