La Guerre sur l'Écorce

De EncyclopAtys

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Ma longue épée s'abattit sur la carapace gris foncé de l'énorme kipucka, y laissant à peine une bosse. L'armure de ces bêtes était sacrément dure.
Près de moi, l'épée-sceptre royale de Son Altesse le Roi Yrkanis frappa dans un éclair et ne fit guère plus de dégâts, mais cela n'avait pas d'importance.
Les forces de Matia étaient stimulées par la présence de leur roi.

Qui, parmi eux, côte à côte et dos à dos, combattait les envahisseurs et montrait aussi peu de pitié pour l'ennemi que chacun d'entre eux.
Resplendissant, enveloppé dans son armure lourde, vert feuille et brun terre, laquée de façon complexe, le roi Yrkanis courait à l'avant de son armée de Guildes loyales, vers l'ennemi.
Peu de temps auparavant, il avait loué les Matis pour leurs efforts et leur persévérance pendant la construction des camps et leur avait adressé des mots d'encouragement.
Car seule la moitié des camps avait été achevée. De terribles explosions avaient secoué trois des six sites de construction et détruit tous les efforts déployés jusque-là. Il y avait des rumeurs de sabotage par les Kamistes, les Maraudeurs, ou même le Cercle Noir, et peut-être qu'une expérience ratée était aussi à incriminer pour les feux encore fumants. Personne ne le savait.

Et pour l'instant, personne ne pourrait le découvrir de toute façon.
Tous les chemins menant aux sites de construction étaient envahis par les kitins, assoiffés de sang homin.
En colère et frustrés par leur propre peur et leur incapacité à passer l'armée les envahisseurs, les guildes Matis et ceux qui leur étaient affiliés avaient répondu à l'appel du roi.
Ils étaient venus pour écouter son discours. Alors qu'il se tenait au centre du pavillon royal, près de la Grande Porte de la ville d'Yrkanis, ses paroles n'étaient pas celles d'un monarque vaincu.
Non, elles enflammèrent le moral usé, dirigèrent notre fureur, tournèrent notre colère vers ceux qui nous tenaient captifs dans nos propres villes et unirent les présents sous son illustre commandement.
Contre le véritable ennemi, le Kitin.
Son discours ne fut surpassé en flamme que par l'appel qui suivit à le suivre là-bas sur le champ.
Au combat.
Au début, nous fûmes surpris, pensant qu'il parlait au sens figuré.
Mais bientôt nous avons dû courir pour rattraper notre roi sorti hors de la ville pour aller vers l'ennemi.
Bientôt nous avons rencontré les premiers petits groupes de l'avant-garde kitine et les avons expédiés.
Cela semblait presque trop facile.
Et ça l'était.
Bientôt, j'allais faire face à une horreur d'une ampleur que je n'avais jamais vue.

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Un petit groupe d'homins soutenait les trois gardes royaux dans leurs efforts pour protéger le roi. J'étais parmi eux. Aucun plus grand honneur ne m'a été donné ce jour-là, que de combattre aux côtés de mon souverain contre l'ennemi terrible.
Notre respect pour le roi grandissait à chaque coup qu'il portait et à chaque goutte de sueur qui coulait sur son front.
Bien sûr, je savais qu'il avait autrefois, dans son jeune âge, combattu les Fyros et son oncle, le meurtrier de son père, Jinovitch le traître. Mais j'ai quand même été très impressionné par son adress et son endurance dans le combat rapproché avec les insectes.
Distrait un moment par sa formidable performance, j'ai baissé ma garde et une énorme griffe s'est ruée vers mon visage. Yrkanis a poussé un cri et s'est placé sur sa trajectoire, détournant le terrible coup qui m'aurait sûrement envoyé sur le sol boueux. Puis il poussa encore et encore vers le grand Kincher qui s'était si dangereusement approché, et se débarrassa de la créature.
L'énorme insecte s'est effondré lorsque le roi a retiré son arme impressionnante de sa carcasse morte.
Le grand sceptre-épée royal n'était certainement pas facile à manier.
Car il était presque aussi grand que le roi lui-même. Ses deux longues lames émettaient constamment des jets de poison vert. Là où elles perçaient la carapace des bêtes, elles buvaient le sang des monstres et le convertissaient en flux d'un nouveau liquide mortel. Ce qui finissait par mettre à genoux les insectes qu'ils avaient blessés, même si leurs blessures n'étaient que superficielles. Améliorée par la technologie Karavan, c'était une arme vraiment unique. Un signe de la faveur de la Déesse Jena sur la maison d'Yrkanis.
Il balança les lames au-dessus de sa tête et les laissa tournoyer comme si l'arme ne pesait pas plus qu'une plume. En se tournant vers l'ennemi suivant, il m'a fait un signe de tête. Son visage sévère et réprobateur vu mon erreur, mais néanmoins avec respect.
Le respect d'un guerrier pour un autre. Je sentis le sang affluer à mon visage et je rougis violemment sous mon casque. J'ai à peine réussi à acquiescer, mais il avait déjà attaqué une autre bête devant lui, combattant aux côtés d'un guerrier Fyros. Je me suis moi aussi tourné vers mon prochain ennemi, car il en venait toujours plus.
Plus d'une fois au cours des heures de combat, une action habile et prompte du roi a sauvé ma vie ou celle des autres combattants à ses côtés. Et tout aussi souvent, chaque homin qui se tenait à ses côtés pouvait lui rendre la pareille. Les monstres qui se précipitaient sur nous étaient si nombreux. Encore et encore, nous nous couvrions mutuellement, ou nous repoussions les griffes et les mandibules qui approchaient de trop près la chair vulnérable d'un compagnon homin.

Pendant ce temps, une vraie tornade magique faisait rage autour de nous.
Les homins libéraient les pouvoirs de la Sève en eux.
Leurs mouvements gracieux étaient presque déplacés au milieu de tant d'horreurs et de morts. Mais ces danses complexes que les mages exécutaient signifiaient soit le salut pour un ami blessé, soit la damnation pour nos adversaires.
Les énergies magiques remplissaient l'air d'odeurs âcres et mélangées de Sève puissante, de chair brûlée et de sang visqueux de kitin agonisant.
Se baissant, sautant et tournant, ces homins répandaient la mort et la vie autour d'eux dans une égale mesure.
Le feu enragé brûlait les insectes jusqu'à en faire des coquilles cendreuses.
La glace gelait leurs mouvements et transperçait leur chair.
Les ondes de choc faisaient éclater leur carapace et les faisaient s'effriter comme du papier écrasé entre les mains.
Le poison se répandait sur leurs corps, les faisant grésiller et tressaillir dans leur agonie.
La magie les faisait fuir de terreur pour donner un moment de répit à un guerrier épuisé ou ralentissait leurs mouvements frénétiques, afin qu'une épée puisse trouver sa cible plus facilement. Certaines bêtes s'endormaient, juste devant les piques des homins, pour être ensuite massacrées sans pitié.

On entendait encore et encore le cri de guerre des Matis : « Jena Aiye ! Yrkanis Aiye ! Maita Aiye !" - "Bénie soit Jena ! Béni soit Yrkanis ! Béni soit Matia ! »

Enfin, nous avons atteint le camp d'observation royal nouvellement établi sur une des collines de cette région dénommée « Sentier des Torbaks ».
Du haut de ces collines, un homin a une bonne vue sur les plaines en contrebas. Au sud, la vue s'étend jusqu'à la kitinière connue sous le nom de « Tunnel des Malheurs », et au nord, on peut apercevoir les hautes falaises de la « Source Cachée ». À l'est, un homin peut contempler les basses terres brumeuses du « Bosquet de la Confusion » et à l'ouest, le « Tertre de la Dissidence ». Un endroit bien choisi et une position parfaitement fortifiée.
Mais ce que nous avons vu ce jour-là a presque glacé le sang dans nos veines.

Les plaines et les collines basses grouillaient des corps pâles des insectes monstrueux venus des profondeurs les plus sombres des Primes Racines. Entre eux, presque perdus dans la foule, erraient de leurs cousins de couleur normale. Qui étaient tout aussi désireux de tuer tout ce qui se présentait devant leurs mâchoires et leurs griffes.
De la ruche au loin, ils se déversaient sur la plaine, comme une mélasse avariée impie et caquetante. Tous les autres animaux de cette zone des Sommets Verdoyants étaient soit morts, soit soigneusement dissimulés. Rien de vivant ne bougeait, sauf les monstrueux envahisseurs et nous.
Partout où nous tournions nos regard, il y avait des kitins. En nombre incalculable.
Plus d'un homin était proche du désespoir devant leur supériorité absolue.

Mais le roi Yrkanis éleva à nouveau la voix et encouragea ses sujets à résister.
Il leur demanda de ne pas abandonner et de se battre pour leur liberté, leur vie et celles de leurs descendants. Pour tout ce qui leur était cher et pour montrer à Atys que les Matis n'abandonnent jamais !

Ses paroles et son courage face à une force aussi écrasante réveillèrent chez beaucoup d'entre nous la volonté de se battre et après un court repos pour reprendre des forces, nous sommes repartis à l'assaut.
Pour décimer la troupe innombrable des bêtes jusqu'à ce qu'il n'en reste plus aucune pour souiller l'écorce de Matia.
Les deux armées s'affrontèrent dans une violente bataille.
Leur seul but commun : la destruction de l'autre.
Quoique énorme, l'armée des homins était presque une force risible contre les masses successives de kitins.
Mais les Homins avaient l'avantage de leur magie et de leurs tactiques.

Nous tenant proches les uns aux autres, afin que les sorts de guérison des mages puissent tous nous atteindre, nous avons avançâmes pas à pas. Dès qu'une blessure s'ouvrait, la magie guérisseuse la refermait et permettait au combattant de reprendre des forces pour terrasser son ennemi. Des orbes d'énergie d'un bleu limpide scintillaient en grands arcs au-dessus de la tête des homins, puis éclataient sur l'un d'eux en diffusant la magie soignante alentour. D'autres lançaient la sève bénéfique en grandes boules bleues qui, brillantes, se transportaient d'homin en homin, ravivant l'esprit et la chair.
Au même moment, les sorts offensifs tonnaient dans les rangs des insectes.
Grognant et rugissant, presque comme les monstres qu'ils tuaient.
Ne laissant que mort et destruction derrière eux.

Yrkanis combattait aux côtés de ses sujets dans ce chaos.
Il hochait brièvement la tête avec gratitude lorsqu'il réalisait que l'épée ou le bouclier d'un homin lui avait épargné une souffrance, ou
pire. Mais jamais il ne s'arrêtait ni ne donnait nul signe de faiblesse dans ce combat aussi épuisant qu'interminable.
Finalement, nous avons atteint la lisière de la forêt et sommes retournés dans les basses terres du « Jardin Majestueux ». Une bande d'écorce étroite, un goulot d'étranglement naturel, dans lequel les kitins n'osaient apparemment pas encore entrer en force, malgré leur grand nombre.
Mais ce jour viendrait bientôt. Nous en étions sûrs. Si nous ne pouvions pas défendre cette dernière frontière naturelle, utiliser le terrain à notre avantage et si nous ne pouvions pas repousser l'ennemi, nous pouvions au moins arrêter les monstres ici. Ou mourir en essayant.

Alors que nous nous battions pour empêcher l'essaim de pénétrer dans nos terres, nous reçûmes des rapports indiquant que des forces kitines gigantesques se rassemblaient au sud, au « Jardin Fugace ».
Ainsi, une fois de plus, une guerre sur deux fronts allait être menée dans les Sommets Verdoyants.
Pour aggraver les choses, l'approvisionnement des camps devait être continué. Les soldats de l'armée royale qui y étaient stationnés ne survivraient pas longtemps sans ravitaillement. On cherchait donc des volontaires pour conduire des missions de ravitaillement à travers les essaims d'énormes insectes.

Je vais contribuer. Je ferai ça aussi.
Si cela signifie la survie de mon peuple, j'extrairai la nourriture de l'écorce à mains nues et j'en porterai autant que je pourrai jusqu'aux avant-postes royaux. Je vais probablement perdre quelques animaux de bât et même quelques montures mais j'aiderai. Je ne serai pas retenu par la peur, comme je l'étais plus jeune.
Et je me tiendrai aux côtés de mes frères et sœurs homins, peu importe la nation à laquelle ils appartiennent. Contre le kitin.

Pour les homins ! Tuez les bêtes !

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Atys est entré dans l'hiver et tandis que les Sommets Verdoyants reposent, rêveurs, sous un manteau de neige, l'ennemi d'antan rôde toujours sur nos terres et tient certaines des marches de nos pays dans la poigne ferme et cruelle de ses griffes.
Une fois de plus, les forces des homins allaient affronter la menace imminente des kitins.
Les éclaireurs Rangers avaient rapporté des informations d'une importance particulière.
Ils avaient localisé l'endroit où les bêtes avaient brisé l'écorce jusqu'à la surface, et par où passaient leurs renforts pour pénétrer plus profondément dans les régions périphériques.
Ainsi, les chefs des nations appelèrent-ils à nouveau leurs sujets à attaquer directement les bêtes.
Cette fois dans le but de les chasser une fois pour toutes de leur pays.

Deux groupes furent rassemblés à Matia réunissant ceux se jugeant prêts pour cette dangereuse entreprise.
Un groupe composé des mages et des combattants les moins expérimentés, arrivés des camps de réfugiés depuis quelques semaines ou quelques mois à peine, dirigés par son Altesse Royale elle-même et ses gardes du corps, devait nettoyer de ses kitins la région du « Jardin fugace ».
Un autre groupe, composé d'homins plus aguerris, devait pénétrer au cœur du « Bosquet de la Confusion » pour détruire les plus redoutables des monstres.
Compte tenu du faible nombre de volontaires expérimentés et de la grande supériorité des kitins, certains émirent des doutes quant au succès de cette entreprise, mais il fallait au moins essayer. Même si nous n'étions qu'une trentaine, contre les centaines qui avaient combattu au début de cette guerre.

Beaucoup furent perdus à jamais à cause des et incessantes et impitoyables attaques des kitins. Perdus lors d'incursions solitaires et insensées, on ne les revit jamais ou on les retrouva massacrés quelques jours après leur disparition. Leur fierté fut leur perte. Ça et leur impatience.
J'admets être en colère contre ceux qui ont refusé d'entendre l'appel aux armes et sont restés dans la ville. Mais beaucoup étaient simplement trop épuisés et trop effrayés pour s'engager une fois de plus dans la bataille. J'ai moi-même eu des doutes sur le fait de remettre mon destin entre les mains de ces quelques homins. Mais ma conscience exigeait que je donne le meilleur de moi-même, pour protéger ceux que j'aimais et le pays que j'avais juré de protéger.

J'ai rejoint cette force, dirigée par Sorum, cheffe de la guilde des « Disciples de Jena », qui partait pour le dangereux bosquet. De nombreux membres de cette guilde étaient avec nous ce jour-là.
En arrivant sur place, nos yeux se sont posés sur d'énormes masses de corps pâles et chitineux se faufilant dans la neige et nos cœurs ont sombré.
Mais grâce à ses talents de tacticienne, Sorum nous a permis de séparer de petits groupes de monstres de la formation principale et de nous en débarrasser.
Nos combats étaient durs et épuisants.
Les kitins menaçaient sans cesse de nous submerger, mais à force de détermination, de courage et de force inébranlable, après des heures de combat, nous avons réussi l'impossible.
Les hordes presque infinies d'insectes se sont dispersées.

Nous nous sommes tous battus avec acharnement. Coup après coup, sort après sort, les monstres devenaient moins nombreux et, bien que j'eusse participé à bien des batailles au cours des derniers mois, je ne me souvenais pas en avoir tué autant en une seule journée.
Comme le monde a changé depuis mon arrivée de Borea dans les Nouvelles Terres.
À l'époque, je venais tout juste d'atteindre la Route de Towerbridge lorsque les bêtes ont frappé pour la première fois. Je n'entendais qu'histoires évoquant les actes héroïques des grands guerriers de l'époque et j'imaginais comment ce serait si j'étais moi-même assez puissant pour affronter sans crainte les kitins avec mon épée et ma magie. Tout comme ces homins le faisait alors.

Au fil du temps et avec beaucoup d'entraînement, j'étais devenu plus fort et plus habile, mais pas assez fort pour être d'une réelle utilité. Quelques fois depuis lors, les kitins pâles avaient à nouveau émergé des profondeurs lors de petites incursions. Jamais en grand essaim, mais toujours dangereux.
Bien que j'aie pu m'aventurer plus loin, mes pouvoirs et mes compétences étaient encore trop faibles pour relever le vrai défi. Partir en guerre sans crainte.
Aujourd'hui, mon pouvoir magique n'était pas loin de son zénith et mon habileté à l'épée longue était presque magistrale.
Mais malgré tout, j'étais terrifié.
À la vue de chaque groupe d'insectes albinos blancs et bleutés chargeant vers moi et mes compagnons, mon cœur s'est presque arrêté, pour bondir de ma poitrine quelques instants plus tard.

J'avais choisi l'épée à une main et un bouclier lourd pour le combat.
Je pensais que je serais capable de frapper avec plus de précision et plus rapidement qu'avec l'épée longue.
J'ai regretté ma décision à l'instant où un énorme kipucka s'est écrasé contre mon bouclier et où je l'ai inefficacement frappé par derrière. Des insectes lourdement blindés, de presque trois fois ma propre taille… mon arme semblait être une aiguille, risible.
Les griffes du monstre se sont écrasées sur mon bouclier, et ce n'est qu'au prix d'un effort considérable que j'ai pu l'empêcher de l'arracher de mon bras. Et d'arracher ce dernier de mon épaule.
Puis il a hurlé de douleur et s'est arrêté net.
J'ai senti le froid terrible du sort qui a gelé son sang et j'ai entendu le craquement répugnant de la pointe d'un énorme cristal de glace qui a transpercé la bête par en dessous. Je me suis appuyé contre le corps massif de l'énorme insecte qui s'est effondré sur moi. Je n'avais aucune idée de qui avait lancé ce sort, mais je remerciais Jena pour tous les mages qui se battaient à mes côtés dans des moments comme celui-ci.
En tant que combattants de mêlée lourdement armés, notre tâche principale était d'empêcher les bêtes d'atteindre les mages. Avec nos haches et nos épées, nous ne causions guère de dégâts aux carapaces dures des insectes, mais nos vaillants efforts permettaient aux Mages de gagner du temps. Car ces bêtes étaient vulnérables à la magie, et si certains y étaient plus résistants c'étaient aussi les moins bien armés.

En gémissant, j'ai soulevé la carcasse du kipucka. Alors que je me redressai et regardai autour de moi, quelque chose s'est écrasé sur moi par derrière et une terrible douleur a traversé mon épaule gauche.
Un kipesta volant, ressemblant à une libellule, s'était approché de moi sans se faire remarquer et avait percé là de son dard l'articulation de mon armure. Alors que je m'éloignais de la bête et qu'elle retirait son dard, nous nous sommes retrouvés face à face. Il plana à un ou deux pieds seulement de moi. Ses ailes translucides s'estompaient dans l'air clair de l'hiver. La bête était plus longue que je n'étais grand.
Son horrible tête sans yeux s'agitait nerveusement de haut en bas devant moi, presque au niveau de mon casque. Comme si elle cherchait quelque chose.
De sa gueule grande ouverte sortaient des bruits stridents.
L'abdomen de la libellule géante, d'un ignoble violet, se tordit à nouveau pour percer mon armure. Mon bouclier ne servant à rien sur mon bras blessé, je parvins à parer son coup juste à temps avec mon épée. Mon épaule était engourdie et saignait abondamment. Le sang coulait sur mon armure, tachant sa finition dorée. Même Erouk'An n'était pas complètement impénétrable.
Soudain, une vague de chaleur et des traits lumineux chargés d'énergie m'ont submergé. Des étincelles brillantes m'ont presque aveuglé mais l'engourdissement a disparu de mes membres et une nouvelle force m'a parcouru le corps.
Une fois de plus, je ne savais pas lequel de mes compagnons d'armes était responsable de mon salut.
Dès que mon bras droit obéit à nouveau à ma volonté, j'esquivai et écrasai, par en dessous, le bord de mon bouclier sur la tête répugnante. Poussant en avant, sous lui, j'ai enfoncé mon épée dans le long abdomen segmenté de l'insecte. Son corps était aussi large que le mien et lorsque j'ai poussé ma lame vers le haut et l'avant, j'ai ouvert la bête dans le sens de la longueur.
Elle a poussé un cri terrible et s'est écrasée sur le sol.

Mais je n'ai pas eu le temps de souffler.
À quelques pas de là, j'ai aperçu un guerrier vêtu d'une lourde armure Tryker noire et or, engagé dans une lutte désespérée avec deux kinrey lourds, de couleur noire et blanche, qui faisaient facilement trois fois sa taille.
En criant mon défi, j'ai couru en avant et fait pleuvoir les coups pour détourner l'un des monstres du grand guerrier. J'ai réussi à l'éloigner de lui.
Ainsi notre combat a continué sans relâche.

La bataille fit rage dans toute la vallée et s'éternisa durant des heures. Nous avons même dû emprunter les sentiers des ravins labyrinthiques et abondamment boisés qui ont donné leur nom à la région.
De temps en temps, pendant les courtes pauses interrompant l'action, quelqu'un qui était en contact avec le groupe de guerriers autour du Roi par le biais de la technologie Karavan, nous renseignait sur leur situation.
Les jeunes homins se sont magistralement battus et la fierté a rempli le cœur de nous autres "vieux guerriers". Nous qui avons également combattu ici pour le salut de notre patrie. Nous étions fiers de ces jeunes réfugiés, car ils avaient prouvé qu'ils étaient prêts à servir leur roi et à risquer leur propre vie pour celle de leurs compatriotes.
Un jour, nous pourrions avoir à combattre à nouveau côte à côte ici ou ailleurs sur Atys.
Ils repenseront alors au jour où ils ont relevé un grand défi pour la première fois et ont remporté la victoire, face à des obstacles apparemment insurmontables.
Des rapports sont également parvenus en provenance des Lacs, du Désert et des jungles profondes que peuplent les Zoraïs.
Tous se débrouillaient bien mais en pays zoraï , les combats étaient violents et le nombre d'homins ayant pris les armes faible. Leur succès était incertain.

Finalement, nous parvînmes à éliminer le dernier des monstres. Je ne sais pas combien de temps nous avons combattu. J'ai l'impression que ce furent des jours mais aussi, d'une certaine manière, que seules quelques minutes passèrent. Les combats se déroulaient dans un flou de mouvements et de lumières magiques. Chacun donna tout ce qu'il ou elle avait, pour emporter la journée. Pour résister une fois de plus et sauver le peuple des Quatre Nations de l'anéantissement.
Comme je l'ai appris plus tard, certains d'entre nous sont allés en pays Zoraï, pour se battre aux côtés des Sages et sauver aussi lePays Malade.
Moi, j'avoue avoir été trop fatigué pour leur aller à leur aide.
Je suis rentré chez moi et j'ai dormi pendant toute une journée.

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Quelques semaines plus tard seulement, des rapports sont arrivés indiquant qu'une avant-garde des monstruosités pâles avait de nouveau été aperçue dans les lagons d'Aeden Aqueous.
Inquiet, j'ai suivi de près les rapports en provenance du pays lacustre et finalement, la nouvelle est tombée : un grand nombre de ces bêtes envahissaient à nouveau les lieux.
Aussi rapidement que possible, la Maison Royale a mobilisé toutes les guildes prêtes à se battre pour les terres alliées et nous nous sommes téléportés au sanctuaire de la Karavan de la région de l'archipel connue sous le nom de "Chutes de la Rosée".

En arrivant, nous assistâmes à un horrible spectacle.
Protégés par la magie du sanctuaire, nous pûmes voir, sans danger, les bancs de corail ondulants et les douces dunes des lagons se remplir d'une multitude de kitins.
Une menaçante force d'avant-garde, qui semblait vouloir s'approcher de la capitale des Trykers.

Déterminés, nous avons fait face aux monstres et immédiatement commencé à dégager une zone autour du sanctuaire. La bataille faisait déjà rage depuis de nombreuses minutes ,lorsqu'un contingent de Trykers et un nombre assez surprenant de guerriers kamistes arrivèrent du Désert et de la Jungle. Menés par quelques Rangers, des éclaireurs neutres qu, demeurant à l'écart des conflits religieux opposant beaucoup des homins, se bornaient à surveiller les mouvements de l'ennemi héréditaire.

La bataille fut menée avec beaucoup de force et d'habileté et plus d'une fois des homins des deux confessions se sauvèrent mutuellement la vie. Les bêtes étaient coriaces et leurs carapaces solides. Curieusement, il s'agissait surtout de kirostas, accompagnés de quelques kinchers de petite taille qui furent éliminés avec une grande facilité.
Mais juste alors que nous pensions avoir éradiqué les attaquants, des kinchers et des kipuckas énormes ont émergé des lacs voisins. Une embuscade !
Comme une marée de pattes sombres et maigres surmontées de corps blêmes, ils ont jailli des eaux peu profondes et se sont jetés sur nous.
Alors qu'auparavant un seul homin combattait un insecte à la fois, tandis que les autres se tenaient à l'écart, désormais plusieurs d'entre nous devaient faire front pour vaincre une seule des grandes bêtes. Dans notre insouciance, nous nous sommes éparpillés sur les plages et de nombreux homins sont tombés sur le sable ou dans les vagues. Tombés avant d'être revenu à portée des sorts de guérison de leurs alliés.
Les monstres semblaient savoir que les guérisseurs étaient essentiels à l'armée homine. Ils continuaient à se jeter sur les mages et nos combattants de mêlée ne pouvaient les repousser qu'avec difficulté.

Pendant que nous nous battions, un homin avait réussi à se glisser dans les rangs des kitins et avait trouvé bien plus que ce qu'il avait prévu.
Une silhouette massive se dressait au-dessus d'une des petites îles qui parsemaient la région.
Un kiban titanesque.
Ce bourdon ouvrier des kitinières, d'ordinaire inoffensif, avait atteint des dimensions inimaginables et semblait travailler l'écorce avec son énorme trompe et ses griffes antérieures. Encore et encore, il crachait de l'acide sur le sol et déterrait le bois dissous. Il essayait de créer une ouverture vers les Primes Racines.
Nous ne pouvions pas le permettre et nous nous sommes jetés contre l'armée d'insectes géants.
J'étais vraiment reconnaissant pour l'énergie curative des sorts qui me touchaient encore et encore. Cela renforçait mes membres fatigués et blessés et me donnait le courage de continuer à me battre. Sachant que quelqu'un avait toujours un œil sur moi.
Aux côtés d'homins du Désert, de la Jungle et du pays lacustres, je forçai mon chemin vers la menace.
Quand les protecteurs du géant furent finalement éliminés, les mages concentrèrent toute leur puissance sur lui. En quelques minutes, la bête tomba dans l'eau des lacs avec un cri strident et un énorme "Plouf".
Mais nos cris de victoire n'ont pas duré longtemps.

D'autres avaient déjà découvert trois autres de ces titans au centre des Lacs. Tout aussi farouchement protégés que le premier que nous avions rencontré, si ce n'est plus.

Nous devions soit diviser nos forces, soit les tuer l'un après l'autre. Un débat bref mais acharné s'ensuivit, mais les esprits plus calmes l'emportèrent… Il fut donc décidé de les attaquer l'un après l'autre, afin de tuer les bêtes le plus rapidement possible. Nous étions sûrs qu'aucune d'entre elles ne pourrait terminer sa tâche dans le temps qu'il faudrait pour tuer les deux autres.
Nous avons donc attaqué, unis contre l'ennemi commun.
Quel spectacle glorieux !
Des homins de toutes les nations, barbotant dans les eaux fraîches et bleues des Lacs. Se précipitant vers la bataille. Des centaines d'entre nous. Se précipitant pour rencontrer les créatures étrangères et les empêcher de prendre pied dans l'une des Nouvelles Terres. Des homins qui s'entrecombattaient parfois âprement, unis et s'entraidant cette fois.

Comme je l'ai appris plus tard, les énormes kibans étaient sortis des eaux entourant Fairhaven, alors que nous nous battions dans la région des "Chutes de la Rosée". Ils avaient pris position dans un semblant de triangle couvrant les petites îles étroites du centre de l'archipel.
La diversion avait presque fonctionné.
Les bêtes étaient plus rusées que nous l'avions prévu.

L'armée unie des Nouvelles Terres dut se frayer un chemin à travers les fantassins de l'essaim pour atteindre les énormes creuseurs.
Nous appliquâmes les mêmes tactiques que celles qui avaient mené à notre victoire sur le premier.
Un par un, ces foreurs d'écorce ont également péri sous les coups des épées et de la magie homines.

Pourtant, alors que le dernier d'entre eux luttait pour rester debout sous l'assaut incessant des homins, quatre énormes kipuckas exterminateurs ont soudainement jailli des eaux qui nous entouraient et se sont précipités à l'arrière de notre armée. Les mages et les guérisseurs. Notre couverture eut été presque anéantie, sans la prompte réaction de quelques-uns, qui réussirent à s'échapper dans des eaux plus profondes pour, lorsque l'attention des monstres se fut tournée vers des proies plus faciles, se précipiter à l'aide de leurs camarades.

La moitié de l'armée unie des Nouvelles Terres se rassembla sur la plage d'une île plutôt petite.
Pendant que l'autre moitié combattait toujours le titan, nous avons réussi à atteindre les exterminateurs en marchant et, surtout, en glissant le long de récifs affleurants à la surface de l'eau. Et tout comme précédemment les titans, nous les avons vaincus un par un. Nous empêchions ses congénères de soutenir notre victime en l'acculant sur l'une des plus petites îles, pendant que quelques courageux d'entre nous distrayaient les bêtes restantes.
Finally, as the last of the titans fell and the last of the exterminators died, a huge cry of joy and relive came from the gathered homins.
La menace qui pesait sur les Lacs était écartée et l'ennemi avait subi de lourdes pertes.
Les homins tombèrent alors dans les bras les uns des autres avec exubérance et, jusqu'à tard dans la nuit, la capitale des Trykers a été le théâtre de célébrations. Nous avons chanté, dansé et loué le courage de chacun.
Une fois de plus, les Nouvelles Terres étaient en sécurité.

Il ne restait plus qu'à voir pour combien de temps.

Lylanea Vicciona, Barde des Quatre Nations