Histoire d’un jeune Fyros/Sixième partie : Différence entre versions

De EncyclopAtys

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Version du 16 septembre 2021 à 07:25

Comme l'avait dit Natto, ils durent souvent s'arrêter pour choisir un autre passage. Plusieurs fois, ils rebroussèrent chemin pour éviter des groupes de gibbaïs, facilement repérables avec leur fourrure bleu nuit. Ils purent même apercevoir un primitif rouge. Il était beaucoup plus grand que les autres et ses poils dressés lui donnaient un aspect enflammé.

― Celui-ci est appelé Gibbakya par les Zoraïs. Il dirige les dégénérés de la région. Je me suis déjà frotté à lui, croyez-moi, il vaut mieux partir.

Le primitif leva la tête et se mit à renifler autour de lui.

― Dépêchez-vous, je crois qu'il nous a repérés.

Ils marchèrent longtemps sans dire un mot. Ils virent enfin de loin le mauve caractéristique de la terre malade.

― Je croyais que vous vouliez vous éloigner le plus possible de la Goo, demanda Eree.

― Ce que vous voyez, même si elles ont la même couleur que la Goo, sont les tentes du campement de la tribu des Antekamis. C'est la teinte traditionnelle chez les Zoraïs. Je ne sais pas pourquoi ils l'ont gardé s'ils haïssent tellement leur peuple. Ces fous vont même jusqu'à mutiler leur masque pour défier les Kamis. Ils ne gardent que le strict minimum, sans cela, ils ne pourraient survivre.

― Comment ça ? Ce n'est qu'un masque, les Zoraïs le gardent pour être liés aux Kamis.
Aetis n'avait jamais eu trop d'échange avec les Zoraïs. Il voyait ce masque comme un snobisme religieux.

― Bien sûr que non ! répondit le Matis. Le masque Zoraï est fixé à l'âme par la magie Kami. Le retirer, ce serait perdre son essence vitale. Rien qu'en arracher des morceaux, c'est déjà de la folie pure ! Les Antekamis n'ont plus aucune branche à leur masque. Ce qu'il reste sont les parties qu'ils n'ont pas pu retirer. Dépêchez-vous, nous avons pris du retard.

Ils s'approchèrent des tentes. Immenses, elles avaient été fabriquées avec des matériaux riches et onéreux. Les trois compagnons s'avancèrent prudemment, Natto en tête. Quatre Zoraïs apparurent au coin de la première tente, leur barrant le passage. Chacun était armé d'une longue pique. Aetis jeta un regard derrière lui. Quatre autres Zoraïs se tenaient derrière eux, empêchant une retraite.

― Ne vous inquiétez pas, dit le Matis, ils m'ont reconnu. Le chef ne va pas tarder à venir.

Aetis et Eree ne se sentaient pas plus rassurés pour autant. Les Zoraïs se rapprochaient, leurs piques menaçantes baissées à mi-hauteur.

― Je me nomme Natto, cria-t-il. Je souhaite parler à Pei-Jeng Luun.

― Et je suis là, mon ami.

Les quatre gardes devant eux s'écartèrent pour laisser place à un autre Zoraï. Plus petit, il se déplaçait cependant avec plus d'assurance. Derrière son masque, son regard n'avait pas le mystère des autres Zoraïs qu'Aetis avait déjà rencontrés. Il était ordinaire, presque vide.

― Bienvenue. Nous apportes-tu à nouveau quelques divertissements ? demanda-t-il.

― Oui, une nouvelle faveur pour le Duc. J'ai ramené l'habituelle compensation.

― Et eux ?

Il pointa du doigt Aetis et Eree.

― Le Duc veut être sûr de leur... loyauté.

― Je vois.

Il détourna le regard des deux Fyros qui avaient peu d'importance à ses yeux.

― Combien nous apportes-tu cette fois ? demanda le chef de tribu.

― La somme habituelle : trois cent mille dappers.

― La somme habituelle a doublé, mon ami. La dernière mission a coûté la vie à sept des membres de ma tribu.

Le Matis ne semblait pas étonné.

― Le Duc pensait bien que vous voudriez un supplément. Il a donc prévu cinq cent mille dappers de plus après la mission. Et il y a la petite prime de servir vos intérêts aussi.

Le chef de tribu scrutait le Matis.

― Nos intérêts ? Tu vas devoir t'expliquer, mon ami.

― La mission consiste à attaquer une procession zoraï pour récupérer le précieux Livre des révélations.

― Où est le piège ? Le Duc n'a jamais été généreux. Pourquoi ce soudain changement ? demanda Pei-Jeng Luun.

― Disons qu'il est très désireux de voir cette mission menée à bien, comme vous j'en suis sûr. Voyez cela comme une prime pour vos précédents services.

― C'est une grande nouvelle. Nous allons frapper nos ennemis au cœur. Une grande fête aura lieu ce soir, nous partirons demain.

― Non, dit sèchement Natto. Nous devons partir au plus tôt. Il nous faut être au défilé du Nœud de la Démence demain à la tombée de la nuit pour l'attaque.

― Il sera fait selon tes désirs.

Le chef de la tribu se tourna vers une Zoraï, près de lui.

― Pingi, ma fille, tu prends le contrôle de la tribu en mon absence. Je veux une trentaine de guerriers prêts à partir dans l'heure. En attendant, vous pouvez vous restaurer dans ma tente, dit-il à Natto.

Il les invita à le suivre. Les gardes étaient déjà partis se préparer.

La nuit venait de tomber. La tribu Zoraï avait forcé le pas toute la nuit précédente et ils étaient arrivés au défilé dans l'après-midi. Seuls les éclaireurs n'avaient pu prendre de repos. Toute la tribu était prête au combat. Ils s'étaient disposés tout autour du défilé afin de ne laisser aucune porte de sortie. Ils attendaient depuis plus d'une heure, et aucun signe de la procession. Les deux Fyros commençaient à s'inquiéter.

Ils étaient restés en haut de la falaise, Natto avec eux. Dès que l'attaque commencerait, Aetis savait qu'il devrait agir vite et tuer le Matis. Malgré la sympathie qu'il avait pour lui, il savait que Natto était trop fidèle au Duc pour les laisser partir en vie.

Aetis distingua difficilement deux éclaireurs de la tribu. Ils revenaient faire leur rapport à Luun. Cela ne dura que quelques instants. Le chef se tourna alors vers Natto et lui fit des signes rapides.

― Ils arrivent. Juste dix gardes et deux chariots, ils seront là dans quelques instants.

― Dix gardes ? Impossible ! Pourquoi ont-ils protégé un convoi d'une telle importance avec seulement dix gardes ? dit Natto, soucieux.

Il doute, pensa Aetis. Le moment est proche.

Quelques minutes s'écoulèrent dans un silence total. Aetis ne voyait plus du tout les Zoraïs en bas. Puis, la lumière des torches transforma le défilé petit à petit. La couleur orange effaçait le sombre noir sur les rochers.

Les premiers gardes zoraïs étaient visibles, portant chacun une torche. Il n'y avait effectivement que dix gardes. Ils entouraient deux chariots tirés par des mektoubs.

Les gardes étaient lourdement armés et épiaient chaque recoin du défilé. Ils arrivèrent rapidement au niveau de l'embuscade. Les Antekamis se déplaçaient silencieusement à couvert pour se mettre en position d'attaque.

Juste au moment où la tribu allait engager le combat, une lumière bleue apparut dans le premier chariot. Tous les Antekamis s'arrêtèrent, déconcertés. Le toit du fourgon explosa. Un magicien zoraï se trouvait au milieu. Les particules magiques couraient encore le long de ses amplificateurs. Autour de lui, trois autres Zoraïs se levèrent à leur tour. Le deuxième chariot explosa alors. Dans celui-ci un magicien Fyros se tenait debout. Quatre autre Fyros étaient déjà descendus du chariot en sautant pendant l'explosion. Aetis ne les avaient jamais vus auparavant, mais il savait qu'il s'agissait des Faces Brûlées, la garde d'élite. Ils se dirigeaient en courant vers les Antekamis encore abasourdis par l'effet de surprise. Le premier tomba rapidement d'un coup d'épée.

Pei-Jeng Luun reprit alors ses esprits et ordonna l'attaque. Malheureusement pour les Antekamis, les Kamistes étaient trop organisés. Les guerriers zoraïs protégeaient férocement les chariots d'où les magiciens lançaient leurs incantations. Les tireurs de la tribu furent les cibles principales des rapides guerriers fyros.

Aetis ne vit pas la suite du combat. Il avait été tellement étonné qu'il en avait oublié Natto. D'un violent revers de la main, le Matis l'envoya au sol. Eree tenta d'attaquer le guerrier dans le dos, mais il bloqua sa main et fit tomber sa dague dans le défilé. De son autre main, Eree essaya de le frapper, mais le Matis était beaucoup plus rapide. Il lui brisa le poignet gauche avec une facilité déconcertante.

Elle lâcha un cri de douleur avant d'être jetée au sol.

Natto se retourna vers Aetis qui se remettait sur pied.

― Je vous ai fait confiance, traîtres, rugit-il.

Il avait sorti son épée.

― Nous sommes restés fidèles à notre peuple, et aux homins.

Aetis fit de même avec son arme.

― Restés fidèles aux homins ? Vous vous faites manipuler et agissez comme des pantins !

Il lança une première attaque. Aetis savait qu'il ne pouvait pas lutter contre la force du Matis et s'écarta. La lame passa à quelques centimètres de lui.

― Pourquoi chercher à tout prix le conflit ? Les peuples sont en paix et le Duc cherche la guerre.

Il attaqua à son tour. Il visa le cou du Matis avec un coup rapide. Mais le guerrier avait de l'expérience. Il bloqua l'attaque et tendit la main pour prendre la garde de l'épée d'Aetis. La force brute parla et Natto envoya le Fyros au sol d'un coup d'épaule.

― Les peuples ne seront jamais en paix ! Cesse de te voiler la face !

La pointe de sa lame touchait la gorge d'Aetis. Celui-ci sentit le sang commencer à couler le long de son cou.

― Misérable serviteur de démons, tu n'aurais pas dû t'attaquer à plus fort que toi.

Un roc lui arriva alors en plein visage, écrasant son nez dans un bruit d'os brisés. Aetis tourna la tête. Eree était debout, elle tenait son bras et faisait une grimace de douleur.

Natto poussa un grognement. Il avait lâché son épée et tenait son visage en sang. Aetis n'attendit pas plus longtemps et décrocha un violent coup de pied dans le torse du Matis. Celui-ci fut projeté par la violence du coup inattendu. Il recula de quelques pas et son pied heurta le bord de la falaise. Il disparut dans un cri effroyable.

Aetis se remit debout et s'approcha du défilé. Natto était en bas. Un des guerriers zoraïs s'approcha avec une torche. Le corps du Matis était déformé tel un pantin désarticulé et le sang maculait les rochers en dessous de lui. Le Zoraï releva la tête et fit signe aux deux Fyros de descendre.

Les Kamistes n'avaient eu aucune perte. Un seul Antekami avait été pris vivant. Le reste de la tribu avait été décimé. Les magiciens soignèrent les blessures des deux Fyros et les installèrent sur l'un des chariots.

― Nous retournons vers Zora. Mabreka veut vous remercier, Vous avez fait du bon travail. Le voyage va prendre quelques temps, profitez-en pour vous reposer.


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